Des bourreaux devenus outils géopolitiques

"Quand l’impunité rencontre les intérêts étrangers, la guerre devient un business."

Des bourreaux devenus outils géopolitiques : le cas de certains entrepreneurs hutu dans la région des Grands Lacs

"Quand l’impunité rencontre les intérêts étrangers, la guerre devient un business."

📜 1. Contexte : du génocide à l’exil organisé

Rwanda, 1994

  • Après la défaite militaire du régime génocidaire, une partie des élites politiques, militaires et économiques hutu impliquées dans le génocide se replie au Zaïre (aujourd’hui RDC).
  • Parmi elles, des hommes d’affaires et grands commerçants qui avaient financé milices et propagande, souvent via la fameuse "Radio des Mille Collines".
  • Ces réseaux s’installent dans les camps de réfugiés à l’Est du Zaïre, où ils reconstituent une structure politico-militaire : les FDLR (Forces Démocratiques de Libération du Rwanda).

Burundi, années 1990-2000

  • Dans le contexte de guerre civile, certains entrepreneurs hutu liés à des factions armées utilisent leurs réseaux économiques pour financer des milices et acheter des armes.
  • Ils profitent aussi de la confusion politique pour se positionner comme interlocuteurs économiques "incontournables" auprès de partenaires étrangers.

🛠️ 2. Leur mutation : du financement local à la connexion impérialiste

Après leur fuite, ces entrepreneurs :

  1. Blanchissent leurs capitaux via le commerce de l’or, du coltan, du café, et parfois du trafic d’armes.
  2. Nouent des relations avec des réseaux économiques internationaux : maisons de négoce à Dubaï, Anvers, et circuits parallèles en Afrique australe.
  3. S’infiltrent dans les dispositifs d’ONG et de lobbying en Europe et en Amérique du Nord pour se refaire une légitimité.
  4. Servent d’intermédiaires entre certaines puissances occidentales et des groupes armés locaux pour maintenir un levier d’instabilité dans la région.

🎯 3. Pourquoi ils sont utiles aux agendas impérialistes

Les puissances extérieures utilisent ces réseaux pour :

  • Perturber les régimes hostiles à leurs intérêts économiques (ex. Kigali ou Bujumbura quand ils prennent des positions souverainistes).
  • Contrôler l’accès aux ressources stratégiques (coltan, cobalt, or) en RDC en entretenant un climat de guerre.
  • Affaiblir les structures régionales comme la CIRGL ou l’EAC qui pourraient renforcer une autonomie africaine.
  • Désunir les populations en réactivant les fractures ethniques, ce qui rend toute union politique ou économique impossible.

⚠️ 4. Les impacts sur la région des Grands Lacs

  • Infiltration économique : détournement des ressources minières pour financer les réseaux armés.
  • Sabotage diplomatique : influence sur certains médias et think tanks étrangers pour diaboliser les gouvernements ciblés.
  • Propagation d’idéologies extrémistes : maintien d’un discours ethniciste pour justifier leur action.
  • Cycle de violences : chaque "crise" dans la région est l’occasion d’élargir leur influence et leurs profits.

🧠 5. Un profil type : "l’entrepreneur de la guerre"

Ces acteurs combinent :

  • Passé criminel (financement ou participation au génocide / crimes de guerre),
  • Capacité économique (investissements dans commerce, mines, logistique),
  • Réseaux internationaux (diaspora, finance offshore, connexions politiques occidentales),
  • Narratif victimaire ("opposants politiques en exil") pour bénéficier de protections.

6. Que faire face à ce phénomène ?

  1. Renforcer les enquêtes judiciaires transnationales sur les crimes économiques liés aux conflits.
  2. Couper les circuits financiers qui alimentent ces réseaux (notamment via Dubaï, Kigali, Bujumbura, Kampala).
  3. Démasquer le double langage : ONG ou associations qui servent de couverture à des acteurs criminels.
  4. Renforcer la coopération régionale pour limiter la marge de manœuvre de ces entrepreneurs de guerre.
  5. Travailler la mémoire et la réconciliation pour neutraliser leur propagande ethniciste.

🔚 Conclu​sion

Ces entrepreneurs hutu liés au génocide et aux violences au Burundi sont devenus des mercenaires économiques et politiques, intégrés à des chaînes de commandement plus larges où se mêlent crime organisé et stratégies impérialistes.

Ils ne cherchent ni la paix ni la justice : leur survie dépend du chaos.

Tant que les économies de guerre et les complicités internationales existeront, la région des Grands Lacs restera vulnérable à ces forces destructrices.

Des bourreaux devenus outils géopolitiques
Michel Ndayishimiye 21 août 2025
Partager cet article
Étiquettes
Archive
La souveraineté militaire : une urgence pour se libérer du néocolonialisme
IKP Ubuntu Mental - Soleil d'Afrique