La Tchéka : un État dans l’État. Qu’en est-il du pouvoir burundais et de ses services de renseignement ?
"Quand les services secrets deviennent juges, bourreaux et stratèges politiques, l’État cesse d’être une République."
📜 1. La Tchéka : prototype du pouvoir parallèle
La Tchéka, première police politique soviétique fondée en 1917, fut l’archétype de l'État dans l’État :
- Elle ne rendait compte qu’au Parti,
- Elle surveillait, arrêtait, jugeait et éliminait sans contre-pouvoir,
- Elle fusionnait renseignement, répression et stratégie politique.
👉 Elle était le bras armé invisible du pouvoir, souvent plus puissant que les ministères.
🕶️ 2. Et au Burundi ? Les services de renseignement comme pouvoir souterrain
Depuis plus de deux décennies, les services de renseignement burundais (SNR - Service National de Renseignement) sont devenus un centre de pouvoir à part entière, doté de :
- Structures opaques,
- Moyens illimités,
- Et une impunité quasi totale.
Certains observateurs vont jusqu’à dire que le véritable pouvoir se trouve au SNR, pas au palais présidentiel.
Le SNR ne protège pas la République. Il protège un système.
🔍 3. Le rôle réel du SNR dans l’appareil d’État burundais
Le SNR est soupçonné (et souvent accusé) de :
- Surveiller la population civile (activistes, opposants, journalistes, diplomates),
- Réprimer l’opposition politique par l’enlèvement, la torture, les disparitions forcées,
- Contrôler l’armée et la police de l’intérieur,
- Monter des dossiers contre des adversaires internes au sein du parti au pouvoir (CNDD-FDD),
- Neutraliser des cadres réformistes ou "modérés", jugés trop indépendants.
Il agit souvent en dehors des canaux judiciaires normaux, et ses agents ne répondent de leurs actes devant aucune autorité civile identifiable.
🔐 4. Un État dans l’État burundais : les symptômes
Élément | Manifestation au Burundi |
---|---|
Ombre sur la justice | Jugements téléguidés, procès inéquitables, détentions illégales |
Double pouvoir | Le Président officiel, et l’appareil sécuritaire invisible |
Absence de contre-pouvoirs | Parlement et institutions judiciaires impuissantes |
Atmosphère de peur | Silence généralisé dans les médias, autocensure, exil forcé |
⚠️ 5. Un danger pour l’État lui-même
Comme la Tchéka, le SNR burundais agit selon une logique révolutionnaire devenue autodestructrice :
- Il prétend protéger l’État, mais affaiblit ses fondements républicains,
- Il crée une culture de la peur et détruit la confiance entre citoyens et institutions,
- Il rend tout projet de réforme dangereux, voire impossible, même à l’intérieur du régime.
Quand le renseignement gouverne, il n’y a plus de politique. Il n’y a que la surveillance et la soumission.
🧠 6. Quelles alternatives pour restaurer un État de droit ?
🎯 Il ne s’agit pas d’abolir les services de renseignement. Ils sont nécessaires à la souveraineté.
Mais il faut les réintégrer dans le champ du droit et de la responsabilité démocratique :
- Créer un organe civil de contrôle parlementaire indépendant,
- Limiter les prérogatives du SNR aux menaces réelles (terrorisme, espionnage, crime organisé),
- Interdire formellement son ingérence dans la politique intérieure,
- Poursuivre en justice tout abus avéré.
🔚 En conclusion : le SNR burundais, entre Tchéka et Françafrique ?
Le SNR burundais fonctionne comme une "Tchéka tropicale", mais aussi comme un garant du système post-colonial : silence, extraction, surveillance.
Tant qu’il n’y aura pas :
- de réforme profonde de l’appareil sécuritaire,
- de retour au contrôle civil,
- et de transparence sur les violations passées,
le Burundi restera un pays verrouillé, où l’ombre décide, et la lumière exécute.